image: Sylvia Kairouz, right, with Martin French: “We want people to live the experience of what we see as being risky or harmful in order to raise public awareness.”
Credit: Concordia University
Un nouveau centre de recherche de l’Université Concordia examinera l’aspect social du virage numérique de l’industrie des jeux de hasard et d’argent.
Situé sur le campus du centre-ville de l’Université, le Collaboratoire pour les études des jeux de hasard et d’argent numériques connectés (CHANCE) permet aux chercheuses et chercheurs d’étudier les aspects sociaux du comportement de jeu, en particulier la manière dont les personnes qui jouent interagissent avec leur environnement ainsi que les unes avec les autres.
« Nous avons simulé un cadre naturel où le joueur, le jeu et l’environnement social sont réunis au même endroit, où nous pouvons filmer les joueurs, écouter ce qui se passe et observer comment ils se comportent ensemble dans un environnement de jeu », explique la codirectrice Sylvia Kairouz, professeure au Département de sociologie et d’anthropologie et titulaire de la Chaire de recherche sur l’étude du jeu de l’Université Concordia.
En tant que collaboratoire, l’espace est conçu pour servir à la fois de laboratoire où des expériences peuvent être menées et d’espace de collaboration où différents partenaires peuvent se réunir pour échanger des renseignements, des idées et des connaissances.
« Pour sensibiliser le public, nous souhaitons inviter les gens à faire l’expérience de ce que nous considérons comme risqué ou nuisible », ajoute-t-elle.
L’espace sera ouvert au public et aux parties prenantes, comme des décideurs politiques et des représentants gouvernementaux. Les participants pourront sentir et voir comment les jeux de hasard et d’argent numériques influencent subtilement, mais concrètement les comportements des joueurs.
« Il s’agit d’une expérience pratique qui amène les gens à réfléchir à la manière de rendre l’environnement de jeu plus sûr. »
Une expérience immersive
Le codirecteur du collaboratoire CHANCE Martin French, professeur agrégé au Département de sociologie et d’anthropologie, le conçoit comme « un outil de réflexion pour essayer de donner un sens au phénomène croissant des jeux de hasard et d’argent numériques. Dans une perspective de santé publique et de prévention des méfaits, nous essayons de réfléchir à la manière dont les risques sont amplifiés, à la manière dont les gens peuvent être placés dans une situation où ils augmentent leur risque de subir les méfaits liés au jeu. »
L’équipe de recherche a conçu une salle qui simule l’espace invitant et accueillant de La Zone du Casino de Montréal, un espace multijeux innovant contenant des dizaines de terminaux de jeux interactifs dans une ambiance de boîte de nuit. Le collaboratoire CHANCE contient quelques terminaux, un écran mural et plusieurs caméras discrètes. Il offre la possibilité d’enregistrer et de regarder ce qui se passe dans le jeu, ce qui permet aux scientifiques de surveiller le comportement des participants pour l’étudier en temps réel et par la suite.
« Nous avons bâti cet espace pour permettre aux gens de vivre l’expérience sociale des jeux de hasard et d’argent, précise-t-il. Le matériel d’enregistrement nous permet de regarder derrière les rideaux du jeu, pour ainsi dire, et l’environnement social dans lequel se déroule le jeu. »
Le centre dispose également de salles de conférence où les chercheurs et les participants peuvent discuter de leurs expériences ainsi que de l’infrastructure technologique et sociale conçue de manière à façonner et à influencer leur comportement.
« La consommation numérique est profondément ancrée dans la vie quotidienne des gens, qu’il s’agisse de jouer à un jeu sur un appareil mobile, de regarder un film sur une plateforme de diffusion en continu ou de commander un repas sur une plateforme de livraison, souligne le Pr French. Le collaboratoire CHANCE peut aider les gens à discuter et à réfléchir de manière critique à la manière dont nos vies numériques peuvent être conçues de façon à influencer nos modes de consommation, nous rendre dépendants et nous maintenir dans la zone de consommation. »
L’équipe de recherche note que si Loto-Québec lui a permis d’accéder à La Zone lors de la mise en place du collaboratoire, l’exploitant de jeux de hasard et d’argent n’a pas participé à l’élaboration du CHANCE.
En effet, dans le domaine des études sur les jeux de hasard et d’argent, comme dans d’autres secteurs de recherche où de puissants acteurs de l’industrie ont influencé la production de connaissances (pensez à la façon dont l’industrie du tabac a contesté les recherches démontrant la nature nocive de ses produits), il est essentiel de maintenir son indépendance par rapport à l’industrie. Ainsi, le collaboratoire CHANCE a été créé grâce à des subventions de recherche, avec le soutien de la Fondation canadienne pour l’innovation, du gouvernement du Québec et de l’Université Concordia.
Visitez le site web du Collaboratoire CHANCE.