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Soulager la douleur, en identifiant ses biomarqueurs

Des chercheuses et chercheurs de l’UNIGE et de la Clinique romande de réadaptation de Sion ont cartographié les biomarqueurs de différents types de douleur, afin de pouvoir les catégoriser et les traiter en conséquence dans le futur.

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Université de Genève

De nombreuses personnes sont confrontées à des douleurs chroniques qui peuvent durer des mois, voire des années. Mais comment traiter au mieux cette douleur? Pour ce faire, il est nécessaire de la catégoriser, afin de pouvoir prescrire le traitement adéquat. Là réside le défi: il est en effet très compliqué pour les patient-es de définir leur douleur, son degré d’intensité ou même sa localisation à travers des questionnaires. Pour pallier cette difficulté, des scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE) se sont associé-es au service de recherche de la Clinique romande de réadaptation (CRR) de Sion, afin d’effectuer une analyse épigénomique complète de patient-es, permettant de trouver les signatures épigénétiques propres à chaque catégorie de douleur. Ainsi, une simple prise de sang permettrait de définir de quelle douleur souffre la personne et, dans le futur, de prescrire le traitement en conséquence et d’observer si les biomarqueurs modifiés par la douleur reviennent à la normale. Des résultats à lire dans la revue Journal of Pain.

Les douleurs chroniques sont classées en deux catégories principales: les douleurs nociceptives – définies par l’activation des récepteurs au bout des fibres nerveuses et que l’on retrouve dans l’arthrose, les brûlures ou encore les infections –, et les douleurs neuropathiques, qui découlent d’une atteinte des structures nerveuses comme par exemple les douleurs en cas de zona. Afin de pouvoir classifier de quelle douleur souffre le patient, celui-ci est amené à remplir plusieurs questionnaires et doit quantifier l’intensité de sa douleur grâce à des échelles évaluatives. Mais cela comporte une grande part de subjectivité, en plus de prendre un certain temps.


Analyser le génome à l’aveugle

«A la CRR, nous traitons de nombreuses personnes souffrant de maladies chroniques, explique Bertrand Léger, chercheur à la CRR et dernier auteur de l’étude. Nous nous sommes alors demandés si nous ne pouvions pas nous associer aux scientifiques de l’UNIGE, afin de pouvoir effectuer une étude épigénomique complète et définir des biomarqueurs spécifiques à chaque type de douleur, pour pouvoir la catégoriser de manière rapide et fiable.»

Pour ce faire, l’équipe genevoise a effectué une analyse des génomes entiers de 57 patient-es: 20 ne ressentant aucune douleur, 18 souffrant-es de douleur nociceptives et 19 de douleurs neuropathiques. «L’objectif était de partir sans hypothèse préalable, afin de sonder le génome dans son ensemble et d’identifier tous les biomarqueurs impliqués dans la douleur», précise Ariane Giacobino, co-dernière auteure de l’étude et professeure au Département de médecine génétique et développement de la Faculté de médecine de l’UNIGE.


Des biomarqueurs spécifiques et potentiellement réversibles

Contre toute-attente, non seulement les scientifiques ont identifié des signatures épigénétiques très frappantes signalant la douleur, mais de surcroit sans aucun chevauchement entre les douleurs nociceptives et les douleurs neuropathiques. «Cette absence totale de similitudes entre les deux catégories de douleur est très étonnante, car intuitivement, nous pourrions penser que la difficulté à définir sa douleur provient d’une similarité dans la signature épigénétique, ce qui n’est en réalité absolument pas le cas», relève Ariane Giacobino.

En effet, les biomarqueurs propres aux douleurs nociceptives sont les gènes du système opioïde – impliqués dans l’émotion, la récompense et la douleur – et les gènes de l’inflammation, propres aux phénomènes irritatifs. Les biomarqueurs des douleurs neuropathiques sont, quant à eux, liés uniquement aux gènes du système GABA, soit les neurotransmetteurs du système nerveux central.

«Maintenant que ces signatures épigénétiques sont clairement définies, une simple prise de sang permettra d’effectuer une recherche sur ces biomarqueurs, afin de définir de quel type de douleur souffre la personne, et prescrire le traitement idoine», se réjouit Bertrand léger. Le traitement ne sera ainsi plus consacré aux symptômes, mais bien à la racine du mal.

Enfin, l’épigénétique étant caractérisée par le fait que l’expression d’un gène se trouve modifiée durablement, il serait peut être possible, en appliquant le bon traitement, de revenir à la normale. «Nous pourrions imaginer suivre la réversion de la douleur en observant, du point de vue épigénétique, si les biomarqueurs reviennent à la normale et adapter le traitement en conséquence», conclut Ariane Giacobino.


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